Même sans y être allé tout le monde a en tête des images de Marrakech. Ville impériale avec Fès, Rabat, Casablanca et Meknès, elle rayonne depuis une époque où des célébrités du show business en ont fait leur destination favorite à la manière d’une résidence secondaire. Mais Marrakech ce n’est pas que des clichés d’abondance et d’effervescence entre ses souks, sa place Jemaa-el-Fna, et la Mamounia. C’est aussi et surtout des couleurs et des parfums dont j’ai envie de vous parler car ils transportent le voyageur. Loin des touristes Marrakech c’est une destination comme une fuite en avant vers le sud, un retour aux sources et à la nature aussi, une escapade binaire à la fois électrique et paisible.
Dans le jardin Majorelle je me souviens du vert lumineux de la végétation baignée de soleil, des jaunes éclatants et des oranges flamboyants des vases et puis de ce bleu Majorelle incomparable. Dans la palmeraie, le chant des oiseaux rythmait mes matins et mes siestes tandis que le parfum enivrant des orangers inondait mes balades. Un vrai bonheur.
Et puis je me souviens aussi de ces rencontres dans la médina. Tous ces yeux me déshabillent doucement mais étrangement je me sens en sécurité comme inondée d’une authenticité que je viens chercher. Et tandis que je me perds dans le dédale des rues sans nom, les images sont de plus en plus fortes. Des tanneurs pataugent dans des bains toxiques où l’odeur pestilentielle des peaux en décomposition me donnent des haut-le-coeur sans que les feuilles de menthe écrasées dans ma main moite n’y puissent rien. J’ai vu là une fatigue décolorée. Des ferronniers d’art s’attellent à la tâche pour que le cliquetis des outils se transforme petit à petit en lampes orientales aux reflets de bronze. Ici et là des odeurs de sang et de volailles où des chats rôdent, affamés, le poil meurtri et le regard vide. Et puis soudainement le ravissement des d’épices, quand les dizaines de monticules aux couleurs chaudes comme un coucher de soleil et aux parfums salés me font presque oublier la souffrance des ânes qui passent dans mon dos et dont les sabots foulent inlassablement le pavé des ruelles sales. Et parfois au coin d’une ruelle la pauvreté aussi s’invite à ma découverte. Silence.
Derrière des portes en bois anodines se cachent des merveilles d’architecture. Le Palais de la Bahia et la medersa Ben-Youssef sont l’écho d’une Andalousie que j’aime tant. Alors je détaille toutes les couleurs des carreaux de faience vert, bleu, ocre, et j’observe leurs formes géométriques. Les stucs sont superbes et la lumière chaude joue avec le relief des parois. C’est amusant.
Le soir venu, la foule s’amasse sur cette grande place Jemaa-el-Fna parmi les charrettes aux olives, aux dattes et aux oranges. Des femmes au henné tendent le bras pour attirer les peaux fragiles des touristes, et des danseurs en costumes traditionnels tourbillonnent. Charmeurs de serpents, herboristes aux potions magiques, curieux, habitués, passionnés, voyageurs, tout le monde s’est invité à la fête, et même les fumées des grillades dansent dans le ciel. C’est incroyable de densité et de curiosités. Enfin le ciel s’ouvre et laisse apparaître les derniers rayons du jour avant que la nuit tombe.
Magnifique article 🙂
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Merciiiii ! 🙂
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Que c’est bien écrit …ça change de tous les récits que l’on peut lire sur Marrakech, tu as un vrai don ! Quand y es tu allée?
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